« Joseph Kabila n’a pas les qualités requises pour assumer les fonctions de chef de l’Etat. Les dirigeants du PPRD le disent en privée» Co-fondateurs du PPRD (Parti du peuple pour la reconstruction et la démocratie), présenté jusqu’ici comme étant la machine partisane du président sortant, Paul Makela dément l’appartenance de Joseph Kabila à cette formation politique. Président d’un cartel politique fondé à Bruxelles, fin 2005, « Paul » a l’ambition de fédérer les forces de l’opposition à Kinshasa. Il accuse « Joseph » de chercher à rempiler plus pour les avantages attachés au pouvoir que pour servir l’intérêt général « Parce qu’il a ramené la paix, qu’il est en place et que la communauté internationale le soutient presque ouvertement, la France en tête, Joseph Kabila, le chef de l’Etat sortant, est l’un des favoris de l’élection présidentielle.» Ce passage est tiré de l’article intitulé « RD Congo : l’élection de tous les espoirs et de tous les dangers », paru dans l’hebdomadaire « Jeune Afrique » n°2355 daté du 26 février 2006, sous la plume de Christophe Boisbouvier. Alors que la « communauté internationale », autant que certains médias internationaux, paraissent décidés à dérouler le tapis rouge sous les pieds du futur président de la RD Congo – dont le patronyme ne fait plus l’ombre d’un doute selon ces milieux, l’opposition congolaise, elle, continue à s’empêtrer dans ses contradictions internes. Aucune éclaircie n’est perceptible à l’horizon à quelques trois mois des consultations politiques majeures. Dans un entretien avec notre journal, l’ex-PPRD Paul Makela, président de l’UPCA (Alliance des partis congolais pour l’alternance), évoque le manque d’unité qui caractérise les forces de l’opposition et d’autres sujets d’actualité dont le premier congrès du PPRD. Selon Makela, une délégation de l’UPCA, conduite par Jean-François Bofua, vice-président de cette plate-forme, doit « descendre », au cours de cette semaine, à Kinshasa. Mission : examiner la possibilité de « fédérer » les forces de l’opposition. « La politique congolaise doit se faire sur le terrain, au pays, et non à l’étranger ». Co-fondateur du parti présidentiel, « Paul » a suivi avec intérêt le premier congrès organisé par ses ex-camarades du PPRD. L’homme met un bémol sur la « force de frappe », vraie ou supposée, de cette formation politique qui accuse une santé financière sans égale dans l’espace politique congolais. « On a toujours cherché à amener Joseph Kabila dans le PPRD. Celui-ci a dit à plusieurs fois qu’il n’en était pas membre».
Coquille vide
Il ajoute : « En réalité, le PPRD n’est qu’un « éléphant blanc ». C’est-à-dire ? « Une coquille vide ». Coquille vide ? Pour Makela, le congrès organisé début février n’a été qu’un « spectacle » où les caciques de ce parti ont défilé à la tribune soit pour injurier des adversaires ou se faire valoir. Il aurait voulu que la direction de cette organisation profite de cette assemblée pour révéler le nombre d’adhérents qui ont pris leurs cartes. « Rien de concret n’est sorti de ce congrès qui a été un échec. L’argent public a été dilapidé pour servir les intérêts de quelques individus qui sont loin de travailler au service de la population ». « Paul » dit avoir attendu en vain que les dirigeants du PPRD énumèrent le « bilan social » de la participation de cette famille politique au pouvoir. « J’ai au contraire entendu le secrétaire général Vital Kamhere, avouer que cette réunion a coûté plus d’un million $ US ». Pour lui, les autres formations politiques devraient exiger le même droit aux subventions des pouvoirs publics. En ne dévoilant pas le nombre de ses membres, estime Makela, le PPRD avoue qu’il puise ses ressources non pas dans les cotisations de ses membres ou militants mais dans les caisses de l’Etat. « Le PPRD devient ainsi un « parti-Etat ». N’est ce pas étrange qu’un parti « sollicite » que son initiateur accepte d’être « son candidat » à un scrutin ? « Si le PPRD était le parti présidentiel, assène Makela, il n’aurait nullement à solliciter le bon vouloir de Joseph Kabila pour être son candidat aux élections présidentielles. Les choses iraient de soi ». Pourquoi la réponse de « Joseph » à cette « sollicitation » tarde-t-elle à venir ? Une phrase assassine tombe : « L’homme est occupé à jauger les tenants et les aboutissants. Vous savez autant que moi que Joseph Kabila n’a pas les qualités requises pour être président de la République ». Makela de poursuivre que si Kabila était candidat à sa propre succession, ce serait pour des raisons de « cupidité » et non « par souci de servir l’intérêt général ». Aussi, conseille-t-il au successeur de « Mzee » de renoncer à ses ambitions politiques tout en restant dans l’armée. « Il doit se retirer pour aller parfaire sa formation militaire. Il en sortirait grandi ».
L’entourage
Propos d’un aigri ? « Je ne suis pas un aigri. Je suis plutôt constant dans mon discours. J’ai toujours tenu le même discours. D’ailleurs, si vous interrogez en privée les « bonzes » du PPRD, ils vous répondront que « Joseph » n’a pas les qualités requises pour diriger un Etat, à fortiori la RD Congo ». A en croire Makela, ceux qui entourent Joseph Kabila veulent creuser sa « tombe » en le poussant à se présenter aux élections présidentielles. Le PPRD est-il oui ou non le parti de l’actuel chef de l’Etat ? L’homme est formel : « Le PPRD n’est pas le parti de Joseph Kabila. Il a été créé par des hommes faisant partie de l’entourage de « Joseph». Selon « Paul », cette formation politique a vu le jour fin mars 2002. Outre lui-même, plusieurs personnalités du sérail kabiliste ont signé les statuts de cette association politique. C’est le cas notamment de Georges Buse Falay (ancien directeur du cabinet présidentiel et ministre), Théophile Mbemba (l’actuel ministre de l’Intérieur), Léonard She Okitundu (l’actuel directeur du cabinet présidentiel), Vital Kamhere, Augustin Katumba Mwanke (le bras droit du chef de l’Etat), Jean-Claude Masangu (gouverneur de la Banque centrale) etc. D’où ce parti tire-t-elle ses ressources? « Le PPRD a placé ses hommes notamment à la Banque centrale du Congo, à la Haute autorité de régulation des Télécommunications ainsi qu’au niveau des régies financières ». Sans oublier les services de renseignements. Selon Paul, tous ces organismes publics échappent au contrôle du système « 1+4 » et servent de « pompe à fric » pour le PPRD. Il en serait de même du Fonds social de la RD Congo dans lequel la communauté internationale déverse d’importantes sommes d’argent pour financer des projets à caractère social. « Ce Fonds est géré exclusivement par Joseph Kabila qui en est le président du conseil d’administration ». Que pense l’UPCA - qui avait milité pour le « Non » lors du référendum – de la promulgation de la nouvelle Constitution et du nouvel emblème national ? Tout en s’inclinant devant la volonté populaire, Makela relève néanmoins « qu’il y a eu beaucoup d’irrégularités » lors du référendum. Se référant à l’expérience du passé au sujet notamment du « Manifeste de la Nsele », l’homme s’interroge si la RD Congo a enfanté des hommes politiques capables « de traduire en acte» la volonté de renouveau contenue dans la nouvelle Constitution. « Je reste sceptique !», murmure-t-il.
Arrogance
Quel est son commentaire au sujet de la phrase contenue dans l’allocution présidentielle du 18 février selon laquelle « le temps du partage équitable et équilibré du pouvoir fait, désormais, partie du passé » ? Makela commence par déplorer l’ « arrogance » présidentielle. « Joseph devient trop arrogant. Il se comporte comme s’il avait déjà gagné les élections. » Et d’enchaîner : « Kabila semble oublier qu’il n’a pas gagné la guerre. Ce n’est pas à moi qu’on va dire que « Joseph » « a accepté de bon cœur » de partager le pouvoir avec les ex-rebelles. C’est faux. Archifaux ! En réalité, l’ex-gouvernement n’avait plus le choix du fait notamment des villes qui continuaient à tomber entre les mains des mouvements rebelles». A quoi ou à qui attribue-t-il la suffisance présidentielle ? Makela pointe un doigt accusateur en direction de « l’entourage ». Selon lui, ce milieu est truffé des personnes qui ne disent pas la « vérité » au chef de l’Etat. « Kabila est très mal entouré ». Que pense-t-il de la déclaration du président de la CEI (Commission électorale indépendante) selon laquelle le premier scrutin n’aura pas lieu avant le 18 juin prochain ? Pour lui, cette déclaration est « suicidaire » pour le Congo.
Nouvelles concertations politiques
Que doit-il se passer au cas où les élections législatives et présidentielles n’avaient pas lieu avant le 30 juin prochain ? « Après le 30 juin, le pays va sombrer dans un vide juridique. Dans cette hypothèse, l’UPCA demandera la démission des membres de l’espace présidentiel ». N’est ce pas de l’utopie ? « Nullement ! Il faudrait de nouvelles concertations politiques pour dégager un nouveau consensus ». Encore un Dialogue intercongolais ? « Les concertations devraient mettre autour d’une table le pouvoir en place et les forces de l’opposition non institutionnelle notamment l’UPCA et l’UDPS ». Pour parler de quoi ? Selon Makela, il faudrait une « nouvelle transition » après le 30 juin 2006. Quels sont les moyens de pression dont disposent les forces de l’opposition non institutionnelle pour imposer cette option ? « Le peuple est avec nous. La population congolaise ne veut plus des personnalités issues de l’AFDL et de ses organisations dérivées. Elle ne veut pas des ex-belligérants encore moins des anciens « mobutistes ». La population souhaite l’émergence d’une nouvelle classe politique. Comme je l’ai dit précédemment, une mission de l’UPCA va à Kinshasa pour voir ce qu’il faut faire sur le terrain.». Paul Makela espère « vivement » que la CEI va ouvrir des bureaux pour permettre aux militants de l’opposition d’aller se faire enrôler. « Sans cela, conclut-il, le pays va vers une catastrophe ». Réalité ou simples outrances verbales ?
Source: congoindependant.com
Aucun commentaire:
Publier un commentaire