Des rebelles à proximité, des médiateurs loin d'être neutres: à
Goma, ville clé de l'est de la République démocratique du Congo, le
scepticisme domine après l'ouverture entre rebelles et gouvernement de
négociations à Kampala qui, dès le deuxième jour, ont été boycottées
lundi par la rébellion.
Depuis que les rebelles du M23 se sont
retirés de la ville sous forte pression internationale le 1er décembre,
après 12 jours d'occupation, la capitale de la riche province minière du
Nord-Kivu tente de retrouver une vie normale à portée de tirs de la
rébellion.
Les soldats mutins, des Tutsi congolais appuyés par le
Rwanda et l'Ouganda selon Kinshasa et l'ONU, ont accepté de se retirer
de Goma à la condition qu'un dialogue constructif s'engage avec le
pouvoir de Joseph Kabila. Ils devaient reculer sur leurs positions
antérieures, à au moins 20 km de Goma. Ils campent à 3 km.
Selon
Me Omar Kavota, représentant officiel de la société civile du Nord-Kivu,
le M23 s'infiltrerait au nord de la ville, notamment autour de
l'aéroport, et envisagerait de couper la route de Sake, à l'ouest, qui
mène au Sud-Kivu voisin. "Le M23 prépare la guerre et se passe (ne tient
pas compte, ndlr) visiblement des pourparlers qui ont lieu a Kampala",
affirme-t-il dans un communiqué.
C'est vrai que les rebelles "ne
sont pas loin", a indiqué le porte-parole militaire de la Mission de
l'ONU en RDC (Monusco), le colonel Prosper Basse, interrogé par l'AFP.
Dimanche, d'après lui, des reconnaissances aériennes menées par les
hélicoptères de la Monusco, dont plus de 6.000 des 19.000 hommes sont
déployés au Nord-Kivu, ont confirmé que le M23 n'avait pas rejoint ses
positions initiales.
Autre avantage des rebelles sur le terrain,
la réouverture lundi par l'armée ougandaise du poste-frontière de
Bunagana tenu par le M23 entre la RDC et l'Ouganda, qui avait été fermé
mi-novembre par Kampala après des plaintes de Kinshasa.
Ce poste,
par lequel transite un important flux de marchandises, était tombé entre
les mains des rebelles début juillet et le M23 en avait tiré de
substantiels revenus, percevant des taxes à chaque passage de
marchandises.
Lundi, les rebelles du M23 ont décidé de boycotter
le deuxième jour des négociations avec les autorités de RDC organisées à
Kampala, reprochant à Kinshasa son agressivité au début des
pourparlers.
La veille, le chef de la délégation congolaise,
Raymond Tshibanda, le ministre des affaires étrangères avait repris la
parole après une mise en cause du gouvernement. "Nous sommes ici pour
négocier, pas pour écouter la colère du gouvernement" a dit René Abandi,
responsable des relations extérieures du M23. Il s'est refusé à dire si
les rebelles participeraient aux négociations mardi. "Quand il nous
semblera qu'il y a un cadre pour négocier, nous viendrons."
A
Kinshasa, l'opposition a refusé de participer aux discussions, de même
que le gouverneur de la province du Nord-Kivu, Julien Paluku.
Avocats, syndicalistes, élus: peu croient en ces pourparlers.
Kambale
Lwanga Chernozem, le secrétaire provincial de l'Union Nationale des
Travailleurs du Congo, "ne (voit) pas ces assises de Kampala réussir".
"Chaque partie va vouloir camper sur sa position" au prix d'un
"sacrifice" de la population.
Pour ce syndicaliste, la position du
Rwanda et de l'Ouganda est problématique: "Comment peuvent-ils être des
médiateurs du conflit qu'ils attisent ?". Kinshasa, mais aussi des
experts de l'ONU accusent ces deux pays de soutenir activement le M23,
ce qu'ils démentent.
"Les vraies victimes de la crise ne sont pas impliquées", déplore de son côté l'avocat Jean Paul Lumbulumbu.
La
rébellion du M23, qui a lancé il y a huit mois l'offensive ayant abouti
à la récente prise de Goma, a suscité la crainte d'un nouveau conflit
généralisé dans la région et d'une grave crise humanitaire.
Les
différentes organisations de secours présentes sur place estiment
qu'environ 138.000 personnes se sont déplacées pour fuir les
affrontements qui se sont produits ces dernières semaines autour de
Goma, une ville de plus de 300.000 habitants.
Dans l'attente d'une
normalisation de la situation, les Nations unies ont renforcé leur
dispositif à Goma. Des Casques bleus patrouillent "jour et nuit dans la
ville en collaboration avec la police nationale congolaise", selon le
porte-parole militaire de la Monusco.
Source: AFP
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