31 octobre 2005

RDC: Ngbanda accuse

Dans un interview accordé au journal le potentiel, l'ancien main droit du feu Marechal accuse.
«Selon la foi chrétienne, c’est nous qui sommes appelés à diriger ce monde» Nous poursuivons la publication de la deuxième et dernière partie de l’ interview de Honoré Ngbanda, ex-Conseiller spécial du Maréchal Mobutu. Après avoir dressé un bilan sévère sur la gestion du pays par l’actuel leadership au pouvoir, l’ accusant d’avoir démissionné de ses responsabilités d’Etat, Ngbanda s’attarde sur sa vocation de pasteur engagé en politique. Il affirme qu ‘il demeure un leader politique chrétien, appelant ses collègues politiques chrétiens «à se sacrifier, comme du sel qui se dilue dans la nourriture pour procurer de la saveur aux prochains autour de nous». Il conclut cette interview en rejetant en bloc toutes les accusations portées contre lui sur un éventuel coup d’Etat avec le concours des éléments des ex-Faz : «Avez-vous déjà vu un commando qui veut traverser le fleuve pour perpétuer un coup d’Etat, procéder et diffuser des communiqués via les Ong pour annoncer son retour au pays ?», s’est-il interrogé.

Ne craignez-vous pas de déstabiliser le processus de transition en cours ?

Qu’est-ce qui est dangereux pour notre pays selon vous? Est-ce d’éviter que notre peuple soit dirigé par celui là même qui a massacré plus d’un million de ses enfants, ou de laisser le pouvoir s’établir sur une série de mensonges et de crimes camouflés ? Savez-vous que pour moins que ça, la communauté internationale avait mis Mobutu et avec lui, tout un peuple en embargo ? Pour de faux massacres de Lubumbashi qui n’ont jamais eu lieu, nous avons vu la Troïka Belgique, France et Etats-Unis remuer le monde entier pour exiger une enquête internationale et pour mettre Mobutu et tout son régime sous embargo politique, diplomatique, économique et militaire! Là, nous avions affaire à un seul étudiant mort lors des incidents entre «camarades» sur le campus de Lubumbashi, tandis qu’ici, nous avons affaire à plus de quatre millions de nos compatriotes tués dans des conditions les plus affreuses par des étrangers qui occupent malheureusement l’espace du pouvoir dans notre pays et empêchent que la vérité explose. Et en plus, il y a des preuves ! La main puissante de notre Dieu a sorti de l’ombre une partie de cette vérité pour nous permettre de nous en saisir afin de faire éclater toute la vérité. A nous donc de jouer !

Vous êtes pasteur et président d’un parti politique. Est-ce que la politique ne s’oppose pas à la religion ? La vérité et le mensonge peuvent-ils faire bon ménage ?

La dernière partie de votre question comporte le fondement même de la confusion qui est à la base de la fausse conflictualité que beaucoup de chrétiens croient percevoir entre l’activité politique d’un chrétien et sa vie de foi chrétienne en Jésus-Christ. La première confusion vient du mauvais concept que les africains, particulièrement les Congolais, se font de la notion même de la politique. Ils associent naïvement et inconsciemment la politique au mensonge, à la tricherie, au vol et à toute forme de malhonnêteté. Cela est dû malheureusement à l’impact négatif de l’image que le peuple a retenue de l’homme politique congolais depuis l’accession de notre pays à l’indépendance. En philosophie, le langage social d’un peuple est considéré comme le reflet de l’imaginaire commun. Ainsi par exemple, le langage populaire des Congolais utilise les mots «politique» et «mensonge» comme des synonymes! Mais cette conception populaire n’est pas conforme à la quintessence même de la politique en tant que réalité sociologique. La politique c’est l’art ou la science de gouverner une cité ou un peuple. Or, si nous regardons bien dans la bible, dès le premier chapitre du premier livre de Genèse aux versets 26 et 27, nous y découvrons que Dieu a créé l’homme et la femme et leur a donné pour mission principale de gérer la terre, donc de la gouverner. C’est cela la mission première de l’homme : dominer, cultiver et fructifier la terre et tout ce qui y habite. Malheureusement, il y a aujourd’hui des chrétiens, et même des serviteurs de Dieu sérieux qui prétendent qu’un chrétien fidèle ne peut pas s’immiscer dans le domaine avilissant de la politique. Je renvoies ceux-là à l’image et au rôle que Christ Lui-même a des chrétiens dans ce monde. Jésus a utilisé pour cela deux métaphores très éloquentes : «vous êtes le sel de la terre», et «vous êtes la lumière du monde». Voilà la vision que Jésus a des chrétiens : «sel» et «lumière». Qu’est-ce à dire ? Jésus considère le monde dans lequel nous vivons comme un monde sans saveur et plongé dans les ténèbres. Mais il envoie ses chrétiens comme du sel pour apporter la saveur dans ce monde. Comment le sel peut-il alors apporter la saveur à la nourriture s’il n’est pas dissous dans la nourriture ? Et comment les chrétiens pourront-ils changer la société humaine s’ils vivent en autarcie vis-à-vis du monde des païens ? Comment le sel peut-il protéger la viande contre la corruption s’il n’est pas dissous dans la chair à protéger ? Et comment les chrétiens peuvent-ils combattre la corruption de la société s’ils fuient cette société ? En fait, qui devrait avoir peur de qui ? Le sel devrait-il fuir la corruption ou c’est à celle-ci de fuir l’arrivée du sel dans la viande? Si les chrétiens ont peur de la corruption, c’est qu’ils ont perdu leur qualité de sel qui devrait plutôt combattre et chasser la corruption ! Et si le sel perd sa saveur, a dit Jésus, il ne sert plus à rien ! Il en est de même pour la lumière. C’est la lumière qui devrait chasser l’obscurité et non l’inverse. Ce sont les enfants du monde vivant dans l’obscurité qui devraient faire place aux enfants de la lumière dès leur arrivée ! Car la lumière chasse les ténèbres. Et notre position dans la société est définie par Jésus lorsqu’il dit qu’on n’allume pas une lampe pour la placer sous la table, mais elle doit plutôt être placée sur un endroit élevé pour éclairer tout le monde. C’est un appel sans équivoque au leadership dans le monde ! Sans vouloir vexer les non chrétiens, j’affirme haut et fort que selon la foi chrétienne, c’est nous qui sommes appelés à diriger ce monde! Pour moi donc, la politique est un appel de Dieu. Elle est un appel à l’apostolat ! Nous leaders politiques chrétiens devrions nous sacrifier, comme du sel qui se consume dans la nourriture (image du renoncement et du don de soi), pour procurer de la saveur (du plaisir, de la joie et du bonheur) aux prochains autour de nous.

Revenons donc à la politique. Au sujet de la tentative du retour des ex-Faz, les autorités politiques à Kinshasa vous accusent d’être à la base de cette initiative parce que vous voulez faire un coup d’état !

Cela ne m’étonne pas d’eux, ce sont des amateurs et des néophytes. Ils ne peuvent pas réfléchir ni réagir autrement. Avez-vous déjà vu un commando qui veut traverser le fleuve pour perpétrer un coup d’état procéder et diffuser des communiqués via les Ong pour annoncer son retour au pays? Il faut être membre du gouvernement 1+4 pour y croire ! Quand j’ai réuni les officiers des Faz à Bruxelles en 2004 pour réfléchir avec eux sur la problématique de leur réinsertion au sein d’une armée nationale congolaise, j’ai pris soin de le faire devant les cameras et d’en faire diffuser les images pour justement rassurer ces messieurs du gouvernement sur la sincérité et la limpidité de ma démarche, mais j’ai recueilli exactement le résultat inverse. Ce fut le branle-bas de combat que j’ai provoqué ! Ces messieurs à Kinshasa n’ont aucune préoccupation de l’avenir de notre pays, seul leur maintien au pouvoir compte. Et même là, s’ils veulent se maintenir au pouvoir longtemps, ils devraient au moins songer à mettre sur pied les instruments de la stabilité d’un pouvoir. Et s’ils pouvaient gratter un peu leur méninge, ils auraient découvert que la constitution d’une armée nationale est l’une des conditions exigées pour la stabilité d’un pouvoir. Les ex-Faz sont là en face d’eux depuis des années, pourquoi ne font-ils aucun effort pour aller les chercher pour les intégrer dans l’armée nationale dont notre pays a besoin ? Si ces ex Faz sont amortis, alors de quoi ont-ils peur ? Mais je trouve que c’est une injure à mon expérience que de mêler mon nom à un mouvement de tête de quelques militaires qui crient leur ras le bol parce qu’ils veulent attirer l’attention du gouvernement de leur pays sur leur triste sort ! Car c’est cela la triste réalité. A moins que les membres du gouvernement trouvent là un sujet pour distraire le peuple congolais des vrais problèmes de sa misère.

PROPOS RECUEILLIS PAR FREDDY MULUMBA WA KABWAYI, ENVOYE SPECIAL A PARIS.

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